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Projet de musée de la préhistoire

jeudi 28 août 2003, par Perrey Luc, Riou Olivier, Rouquette Sylvie

Mystérieux dolmens, os d’hommes des cavernes ou silex taillés : un musée de la préhistoire locale pourrait être créé au nord de Montpellier, près du pic Saint-Loup. Révélations sur un projet qui plonge les garrigues 60 000 ans en arrière.

Un groupe de néandertaliens chasse le bouquetin sur les falaises de l’Hortus. Nous sommes au paléolithique, 60 000 ans avant notre ère, à une vingtaine de kilomètres au nord de Montpellier. A cette époque, le plateau de l’Hortus est couvert d’une épaisse forêt de feuillus, peuplée d’ours et de lynx. Soudain, une panthère surgit. Les chasseurs préhistoriques auront-ils le temps de se réfugier dans leur grotte, à flanc de falaise, celle qui nous a livré une partie des secrets de ces premiers hommes ?
Voici le genre de scène que "le musée de la préhistoire des garrigues" compte bien reconstituer. Jeudi 17, le projet fait son premier pas concret : sollicité pour une partie du financement, le Conseil Général lance une étude de faisabilité. A l’initiative de ce passionnant projet : le célèbre paléontologue Henry de Lumley, celui qui a fouillé la grotte de l’Hortus, et une trentaine de scientifiques montpelliérains (Fac de Sciences et de Lettres, CNRS, Sociétés d’archéologie). Si le financement suit, ce musée pourrait ouvrir en 2006, à Saint-Mathieu-de-Tréviers ou à Valflaunès, tout près du pic Saint-Loup. Tour du dossier en trois questions.

1. Pourquoi valoriser la préhistoire ici ?

Parce que "la région des garrigues, dans le secteur de l’Hortus, est très riche en sites préhistoriques méconnus", répond Henry de Lumley, professeur de paléontologie au muséum national d’histoire naturelle.
Deux périodes sont particulièrement bien représentées. D’abord, le paléolithique moyen (de 60 000 à 35 000 ans av. J.-C.) : c’est l’époque où les néandertaliens vivaient dans la grotte de l’Hortus, sur la commune de Valflaunès, site de fouille exceptionnel qui a permis de mieux connaître la civilisation dite "moustérienne". La grotte du Cayla, près de Saint-Martin-de-Londres, et la grotte du Salpêtre, à Pompignan, témoignent également de cette société de l’âge de pierre.
Ensuite, beaucoup plus tard, la période du néolithique final (de 2 500 à 1 800 av. J.-C.) : on en retrouve la trace à travers les dolmens des causses de Viols-le-Fort, ou de Ferrières-les-Verreries, qui ont inspiré les civilisations dites de Ferrières et de Fontbouisse. Citons encore les villages de pierre sèche d’Argelliers ou de Claret, dont l’architecture est unique au monde.

2. Ce musée, on y verra quoi ?

Des ossements et des pierres préhistoriques trouvés ici. "On présentera des os de bouquetins, d’aurochs, de rennes, de panthères, et même d’un rhinocéros, qui vivait dans la vallée", décrit Paul Boutié, maître de conférences à l’université Paul-Valéry. Des restes de néandertaliens (mâchoire, fémurs), actuellement conservés par le musée de Tautavel (Pyrénées-Orientales), et des silex taillés, compléteront la collection. Sans oublier, enfin, des moulages de dolmens ou de statues-menhirs perdus dans la garrigue.
Modernité oblige, des films et des vidéos redonneront vie à ces premiers hommes sous la forme d’images de synthèse. De plus, une salle devrait être consacrée à l’évolution du climat et des paysages : steppe des périodes froides, forêt des phases tempérées, déforestation et mise en place de la garrigue actuelle. Enfin, un "parc-jardin préhistorique", avec aurochs et bisons, pourrait être crée à l’extérieur. C’est pas Jurassic Park, mais presque !
Autre aspect du musée : son rôle de valorisation des structures et des sites périphériques déjà existants. Ainsi, le visiteur y trouvera des plaquettes renvoyant au petit musée de préhistoire des Matelles, à l’exposition "L’âge des garrigues" de Viols-le-Fort ou au site archéologique de Cambous. Les plus courageux pourront prendre un guide pour marcher jusqu’au dolmen de Feuilles ou au rocher du Causse.

3. Quels sont les objectifs ?

Valoriser ce patrimoine, mieux le conserver et contribuer au développement économico-touristique du nord montpelliérain. "Le matériel préhistorique découvert reste très dispersé, difficile d’accès, et conservé parfois dans des conditions précaires, commente Henry de Lumley. Le musée permettrait de réunir l’ensemble dans de bonnes conditions et d’en faire profiter les Montpelliérains comme les touristes".

Evidemment, ce projet a un coût, assez important : 11 millions d’euros (72 MF) pour un bâtiment de 7 000 m2.
Outre les subsides du Département (à hauteur de 20 % de l’investissement), le financement de l’Etat (40 %), de l’Europe (20 %) et des communes est sollicité. Mais une fois construite, la structure pourrait rapidement s’équilibrer : pariant sur 200 000 visiteurs annuels [1], du grand public familial aux étudiants-chercheurs, elle épongerait, à travers ses recettes, un budget de fonctionnement annuel de 600 000 euros (4 MF).
Plus largement, le musée et ses visiteurs doperaient l’activité locale : celle des hôtels, des chambres d’hôtes, des restos, des commerçants et des artisans. Les communes d’accueil l’ont bien compris : non seulement elles ont voté des délibérations favorables au projet mais, en plus, elles ont déjà réservé les terrains d’implantation (pour Valflaunès, à proximité de l’école, à l’entrée du village, pour Saint-Mathieu-de-Tréviers, près du lac de Jeantou ou au lieudit Les Hortasses).
Reste que le projet ne fait pas l’unanimité, et n’est pas encore assuré.
Au Conseil Général, une partie des élus préférerait aider les petites structures déjà existantes plutôt que de créer un vaste musée central. Certains craignent aussi "un investissement pharaonique qui risque de se transformer en gouffre, à la manière du pont du Gard".
Seule certitude : l’étude d’opportunité est lancée par le Département. Un premier pas pour les premiers hommes.

P.-S.

Article de presse écrit par Olivier Rioux avec le tître "Pic Saint-Loup : Le retour de Néandertal"
La Gazette de Montpellier n°790 - Juillet 2003

Notes

[1Entre les 300 000 visiteurs du musée de Tautavel (Pyrénées-Orientales) et les 170 000 de Quinson, dans les gorges du Verdon (Alpes-de-Haute-Provence)

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