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Mormellicum - Puech de Mourgues (4/4) : territoire, synthèse

samedi 27 octobre 2007, par Genty Pierre-Yves, Schneider Laurent

 6. Territoire

6.1. Essai de définition

Les sources écrites du haut Moyen Âge présentent clairement le castrum de Mormellicum comme le chef-lieu d’un vaste territoire, circonscription administrative du pagus de Maguelo-ne dans laquelle les scribes situent biens et localités jusqu’au seuil de l’An Mil. Quatre actes échelonnés entre le début du IXe et la fin du Xe siècle permettent d’entrevoir quelques points de l’extension de ce territoire.

En 816, un scribe du monastère de Psalmodi (A.D., Gard, H 106, f° 13r) place les villae de Saligno et Salignello dans le pagus de Maguelone et le suburbium du castrum de Mormellicum ce qui indique clairement que son territoire s’étirait en direction du nord-est sur une dizaine de kilomètres jusqu’au rivage du Vidourle dans le secteur de Salinelles et Sommières. Cette extension est encore confirmée dans le dernier tiers du Xe siècle par la localisation de l’église Saint-Hilaire (de Beauvoir) et de l’honneur de Garrigas (village actuel de Garrigues) dans la vicaria de Mormellico (L.I.M., p. 559 et 580). Enfin, une charte mal datée, antérieure à 923, du cartulaire d’Aniane (Cart. An., LXII, p. 202) place deux villae non identifiées (Tro-lias et Maurencianicus) dans le ressort des castra de Substan-tion et Mormellico et la vallée Filenense (Valflaunès), soit à environ 6 kilomètres au nord-ouest du site dans le petit bassin du Rieufrèche.

Durant le haut Moyen Âge, le territoire administratif rattaché à Monnellicum s’étendait donc essentiellement dans la vallée de la Bénovie au nord-est, et celle du Rieufrèche au nord-ouest. Ce ressort pouvait être encadré, à la même époque, par les districts castraux de Sauve et d’Agonès au nord et au nord-ouest et par les vicariae de Tréviers, de Nages et de Littoraria respectivement à l’ouest, à l’est et au sud.

6.2.Terroirs et ressources

La grande plaine cultivée qui s’étale au sud du Puech des Mourgues constitue le seul bassin cultivable des grands abords de l’agglomération. C’est dans cette zone basse en forme de haricot, d’une superficie d’environ 470 hectares, que se trouve, dès le Haut-Empire, la majorité des établissements dispersés d’époque antique. Les autres terroirs correspondent aujourd’hui à des sols rocailleux et pierreux plus difficiles à cultiver. Le plateau du Puech des Mourgues lui-même ne pouvait être que d’un très faible rapport. Il correspond partout à un socle rocheux, lapiaz quasi stérile qui ne pouvait comporter tout au plus qu’une herbe courte et maigre pour la nourriture du petjt bétail.

6.3 Organisation

6.4 Habitat rural

Si les proches abords du Puech des Mourgues n’ont jamais fait l’objet de prospections systématiques, plusieurs points d’occupation antique ont été cependant signalés à la suite de prospections anciennes, au lieu-dit Serre Plumée et Serre de Canne notamment. En revanche, toute la zone sud-ouest de la commune a été prospectée récemment à la suite d’un incendie de forêt. Elle n’a révélé qu’un seul établissement antique caractéristique au lieu-dit Cayrisses, établissement que l’on peut sans doute lier à l’exploitation de deux petites vallées cultivables mais entièrement encaissées dans un paysage rocheux, l’ensemble des garrigues paraissant par ailleurs délaissé pendant toute l’Antiquité.

Dans la plaine méridionale de Saint-Bauzille-de-Montmel, des prospections régulières mais aléatoires, menées par P.-Y. Genty dans le cadre de cette enquête ont, en revanche, permis de repérer plusieurs établissements ruraux typiques, quelques zones de fréquentation antique difficiles à caractériser et des traces de mise en culture agricole.

Le Cayret : à 4 400 m au sud-ouest de l’agglomération, le site du Cay-ret est une ferme ou une modeste villa, tournée face au bassin de la Cadoule et occupée du début de notre ère jusqu’au Ve siècle. Les Cayrisses : situé à 3 000 m au sud-ouest de l’agglomération, le site des Cayrisses est un établissement antique d’une superficie d’environ 2 000 m2 implanté sur une étroite terrasse rocheuse en ligne de crête. À 120 m de distance de cet habitat principal occupé durant toute l’Antiquité, des bâtiments annexes ont été repérés. Après le Ve siècle de notre ère, un nouvel habitat, occupé entre le Vie et le Xlle siècle, a été implanté une dizaine de mètres au nord de l’établissement antique principal (Genty 1992 :125 et fig. 32).

Butte de Montaud Nord-Ouest  :.au cœur de la plaine de Saint-Bauzille-Montaud-Favas, à 2 200 m au sud de l’agglomération se trouve un petit établissement occupé durant le Haut-Empire. Les Rouquiolles : cet habitat rural lié à la mise en valeur du petit bassin du ruisseau des Campets se trouve à 1 300 m au sud-ouest de l’agglomération et a livré des mobiliers républicain et de la fin de l’Antiquité (Ve siècle).

Font de la Vie : dans la plaine de Saint-Bauzille-de-Montmel et Mon-taud, à 1 000 m au sud-ouest de l’agglomération se trouve un petit établissement gallo-romain du Haut-Empire.

Séné Longue ; à 1 000 m à l’ouest de l’agglomération, dans un secteur boisé sur la courbe est-ouest qui borde au nord le massif des Mourgues, se trouve un établissement gallo-romain mal caractérisé dont la chronologie ne peut d’ailleurs être précisée en raison de l’importance de la végétation.

Nicole Ouest : dans la plaine de Saint-Bauzille-de-Montmel, à 800 m au sud-est de l’agglomération est implanté un établissement rural du Haut-Empire.

Valat de Riu II : à 1 900 m au sud de l’agglomération des fragments d’amphore italique trahissent peut-être l’existence d’un habitat léger d’époque républicaine.

Sen-e de Canne : situé à 2 100 m au sud-est de l’agglomération, cet établissement, implanté dans la grande plaine de Saint-Bauzille-de-Montmel, Montaud et Favas, a été occupé depuis le début de notre ère jusqu’au Ve siècle.

Favas Nord : dans la plaine de Saint-Bauzille et Montaud, à l’est-sud-est de l’agglomération, à 2 100 m de distance se trouve un petit établissement d’époque antique indéterminée.

Le Grand Devès : à environ 2,5 km à l’est de l’agglomération différents indices signalent l’existence d’un établissement antique occupé durant la République et le Haut-Empire.

Les Madones : dans un secteur de friches, à 1 600 m au sud de l’agglomération sur les pentes ouest du bassin de Saint-Bauzille-de-Montmel, quelques rares indices de surface d’époque romaine au sens large évoquent peut-être l’existence d’un petit établissement peu caractéristique. Valat de Riu I est un établissement rural gallo-romain mal caractérisé, localisé à 1 800 m au sud de l’oppidum.

La Cannelle : ce site mal caractérisé, d’époque romaine indéterminée, se trouve en sous-bois dans la plaine sud du bassin de Saint-Bauzille-de-Montmel à 4 100 m au sud de l’agglomération. Au cœur de la plaine, à 2 000 m au sud de l’agglomération, des traces d’épandages agraires rattachés à la fin de l’Antiquité ont été observées. Le Bois Calinier : au sud-est et à 1 600 m de l’agglomération, le site du Bois Calinier correspond à un établissement d’époque antique indéterminée dominant au nord la plaine de Saint-Bauzille et Montaud. Le Devais des Agneaux : à 1 400 m au nord-ouest de l’agglomération dans la petite plaine de Saint-Germain, des indices gallo-romains mal caractérisés font songer à des abords d’habitat ou plus probablement à un secteur d’épandages.

Serre de Malestieu : dans la petite plaine située à l’est du château de Montlaur à plus de 3 400 m au sud-est de l’agglomération des indices d’anthropisation signalent probablement l’existence d’épandages d’époque romaine indéterminée.

Malgré la difficulté constante à caractériser précisément chaque établissement en raison des très faibles collectes de mobilier qui ont pu être réalisées, on peut noter que trois établissements ruraux au moins, le Cayret, les Cayrisses et Serre de Canne, sont occupés du début de notre ère jusqu’au Ve s. soit bien après la création de l’agglomération. Ce sont là, bien sûr, des données encore faibles et fragiles en l’absence de prospections systématiques et de fouille mais cela suffit, nous semble-t-il, à indiquer que la création de cette nouvelle agglomération n’a pas vidé les terroirs environnants de ses hommes et que son peuplement n’a été rendu possible que par l’arrivée d’une nouvelle population.

 7. Synthèse

L’agglomération du Puech des Mourgues à Saint-Bauzille-de-Montmel peut être rattachée à un groupe d’agglomérations maintenant mieux connues qui ont pour première caractéristique d’être toutes fondées a novo à la fin de l’Antiquité, soit dans un très large Ve siècle. Bien que perchée et dotée d’un rempart, elle se distingue cependant de ses homologues telles Pampelune à Argelliers dans l’Hérault ou Lom-bren à Vénéjan dans le Gard par une superficie d’occupation bien plus importante et par une implantation topographique originale, liée ici à une position intermédiaire à mi-pente. Bien que fortement perchée, l’agglomération de Mormellicum est implantée, en effet, sous la couronne des falaises sommitales. Cette position particulière explique peut-être le chapelet de sites secondaires disposés tout autour de la hauteur, établissements annexes ou bastions (?) préposés à la garde et à la surveillance des différents accès permettant d’atteindre le plateau sommital et la bande de terrain compris entre les ceintures de falaises.

L’originalité du site de Mormellicum est aussi liée à l’existence de sources écrites du haut Moyen Âge qui définissent l’agglomération comme un castrum et comme le chef-lieu d’un vaste territoire administratif découpant au début du IXe siècle une partie du pagus de Maguelone. Ce grand district a peut-être été mis en place en même temps que l’agglomération dans le courant du Ve siècle, à une époque où ce territoire relevait encore de la cité de Nimes. Si cette hypothèse se vérifiait, on aurait là un exemple de la réorganisation du réseau urbain et des territoires administratifs à la fin de l’Antiquité, c’est-à-dire à un moment où la mise en place progressive des cadres de l’organisation ecclésiastique entraîne également la promotion de nouvelles agglomérations au rang de cités telles Agde, Maguelone ou Uzès (Schneider 2001). À bien des égards, l’agglomération de Mormellicum trouve ainsi des points de comparaison avec la nouvelle agglomération perchée d’Anduze que les sources écrites du LXe siècle présentent également comme un castrum et comme le chef-lieu d’un vaste ressort défini indistinctement par les termes suburbium, aicis, pagus ou vicaria, circonscription administrative participant, à cette date, au nouveau (?) découpage du territoire de la cité de Nimes.

P.-S.

Avec l’aimable autorisation de Pierre-Yves Genty et Laurent Schneider. Dactylographie : Luc Perrey.

Cette page est une partie de l’article "Mormellicum (Puech des Mourgues)" extrait de "Les agglomérations gallo-romaines en Languedoc-Roussillon, II" sous la direction de Jean-Luc Fiches. Parution en 2002.

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