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Les Wisigoths (400-700 de notre ère)

lundi 25 juillet 2005, par Arnal Jean, Rouquette Sylvie

Nous venons de voir que vers ou après 375, les Gallo-romains ont fui au Lébous devant des envahisseurs inconnus. Dès 405, arrivent les Wisigoths. Peut-être les habitants de Tréviers voudraient-ils savoir le nom de leur roi au début du Ve siècle ? D’après Charles d’Aigrefeuille (Histoire de la ville de Montpellier 1775), il s’appelait Ataulphe. Cet amoureux de Placidia, soeur d’Honorius, empereur romain, était revenu prendre Rome vers 409 pour enlever l’objet de son amour. Cette dernière avait comme dot le Languedoc-Roussillon, malheureusement occupé par les Vandales. Ataulphe n’hésita pas, pour toucher la dot, il se jeta sur ces barbares dont le terrible nom rappelle leur valeur guerrière et non seulement les chassa de France mais les poursuivit jusqu’au sud de l’Espagne. Finalement obligés de passer en Afrique du Nord, les Vandales allèrent se faire écraser par les Egyptiens qui les ont tous massacrés. Pour remercier Ataulphe d’un tel exploit, ses sujets l’ont assassiné et Placidia est retournée à Rome.

fig. 11 - Boucles de ceinturon wisigothiques ; à gauche, cimetière des Pinèdes, VIe siècle ; au milieu et à droite, Claret et Sainte Croix datés du Vlle siècle comme le cimetière de Cécelés.

En 1957, avec Maurice Rougé, nous avons fouillé le cimetière des Pinèdes en catastrophe car le tracteur à chenilles qui défonçait le champ ne s’est jamais arrêté. Nous avons découvert 18 tombes aux squelettes admirablement conservés. La taille de la majorité des in¬dividus variait entre 1,62 m pour les hommes et 1,54 m pour les femmes. Plus tard, stupeur, nous trouvons un homme de 1,84 m accompagné de sa femme, belle fille de 1,74 ! A côté, leur fils âgé de 14 ans avait déjà la taille de sa mère présumée. En général, les deux membres de chaque ménage étaient enterrés ensemble. Une seule tombe contenait deux femmes tandis que près d’elles, un célibataire se prélassait seul dans sa tombe.

fig. 12 - Sarcophage gallo-romain du Ve siècle réutilisé au VIe siècle aux Pinèdes par les Wisigoths. Déposé au centre de la mairie. (Photo Monod

Les tombes étaient bordées de petites dalles et couvertes par trois ou quatre autres un peu plus grandes. Par chance, le premier sar¬cophage trouvé est le seul à mériter ce nom. Il est fait de deux monolithes, la cuve et son couvercle. On peut le voir dans le jardin intérieur de la Mairie du village (fig. 11 et 12).

Il nous a surpris car le couvercle était trop grand. En réalité, il se compose de deux éléments pris à deux tombes différentes provenant d’un cimetière gallo-romain du cinquième siècle et réutilisé au siècle suivant : la cuve taillée en zigzag et le couvercle à sept acrotères, c’est-à-dire des reliefs disposés latéralement. La principale placée au-dessus de la tête du mort représente son visage. Les deux acrotères qui l’encadrent, image de la force, évoquent des griffes de lion.

II n’est pas sans intérêt de rappeler que les Wisigoths pratiquaient l’arianisme, hérésie disparue avec eux. Conservant d’anciennes coutumes, ils s’enterraient avec leurs vêtements comprenant quelques objets familiers notamment leur boucle de ceinturon à laquelle ils attachaient une grande importance. Pour les pauvres, elle se réduisait à un simple ovale de fer avec son ardillon tandis que les riches avaient des exemplaires glaçurés. L’homme le plus grand et sa femme possédaient respectivement, lui une boucle en bronze glaçuré de verre bleu et la plaque cloisonnée de verres verts et rouges bordée de minuscules grenats, elle, une boucle rectangulaire en bronze peint en bleu ciel. II s’agit de pièces « syro-coptes » fabriquées à Constantinople. D’autres objets pouvaient accompagner les morts : boucles de bandes-molletières trouvées près du tibia, des couteaux dont il ne reste que le fer, des crochets de bourse en bronze et une boîte en plomb écrasée (fig. 11).

fig. 10 - Village des Crotasses daté entre le Vie et Xe siècle de notre ère

Le professeur Riquet a remarqué, grâce aux ossements des Pinèdes, un état de santé médiocre pour les populations moins bien portantes que du temps des romains. Leur vie devait être plus pénible, des pérégrinations belliqueuses pour les Wisigoths, l’inconfort de l’après-guerre pour les autochtones...
Comme maladies, beaucoup de rhumatismes dus au manque de confort, et quelques blessures infectées.

A la fin du VIIe siècle apparaissent les plaques-boucles faites d’un seul bloc. Elles se présentent sous la forme d’une plaque de bronze rectangulaire dont le grand axe se termine en arc de cercle. Près de l’ardillon, une ouverture anguleuse permet le passage de la ceinture. Une des plus belles a été trouvée dans le cimetière de Cécelès au XVIIIe siècle, elle est ornée d’un cheval qui boit dans une coupe, sur son dos est posé un oiseau tandis qu’un poisson ailé semble nager entre ses pattes. Quoique publiée plusieurs fois et citée dans les grands catalogues, personne ne savait où elle se trouvait et on la considérait comme perdue lorsqu’une bibliothécaire de la Faculté des Lettres de Montpellier, Annick Peyron l’a retrouvée dans un tiroir du Musée archéologique de Narbonne.

Un troisième cimetière wisigothique a été découvert par la famille Ratier à la Vieille, au pied de la colline du village fortifié des tours de Salles. Agglomération construite presque entièrement en pierres sèches, seules les deux tours-donjon et la porte d’entrée ont été cimentées. Elle a pu être construite vers le VIIIe siècle et perdurer jusqu’au XIIe. Le cimetière de la Vieille peut aussi bien appartenir au hameau ou être une émanation du castrum qui le domine.

Le VIIe et le VIIIe siècle ont laissé des traces visibles à Sainte-Croix-de-Quintillargues où nous avons trouvé dans un cimetière une boucle articulée à une plaque ornée de quatre faucons disposés par deux. Des boucles similaires garnissent quelques musées d’Espagne. Elles sont antérieures ou contemporaines de l’arrivée des Sarrasins. Le masage des Crotasses. Les vestiges civils ou religieux des cinq derniers siècles avant l’an mille, appelés pré-romans, n’abondent pas dans la région. Sur le tènement dont il porte le nom, ce hameau étale la terrasse de ses ruines. Le terme de Crotasses se compose de crotte (voûte) et du suffixe asse (détruit), par exemple, gleisasse évoque le souvenir d’une église disparue ou d’un cimetière, même gallo-romain.

Le masage devait avoir entre trois et cinq maisons dont deux reconnues. Construites en murs de pierres sèches, recouvertes de chaume, leur plan ressemble à celui d’une maison romaine du IVe siècle trouvée près du gisement préhistorique du Lébous : une cour de ferme carrée ou rectangulaire dont un mur de refend limite l’habitat à quelques mètres du fond (fig. 10). La pauvreté du lieu n’a pu apporter de datation, en l’absence de monnaie rarissime chez les Barbares, la céramique commune n’apportant aucune précision.

P.-S.

Source : "Saint Mathieu de Tréviers - Cinquante mille ans d’histoire". Livre écrit par Jean ARNAL avec la collaboration de Sylvie ARNAL - 1986
Avec l’aimable autorisation de Michel Arnal

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